JE SUIS

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JE SUIS

*

Je connais les secrets du Monde des Sphères.
Je sais ce qui a été avant que le temps n’existe, et ce qui sera quand il cessera de couler.
Je sais ce qu’il y a au-dela de l’Univers, et ce qui se cache en-deça.
Je connais toutes les réalités, celles qui sont, celles qui seraient, celles qui pourraient être.
Je sais pourquoi le monde est ce qu’il est, je connais sa cause et sa raison.

Qu’il est bon de savoir…

*

J’ai oublié !

Je savais l’harmonie, les vibrations subtiles qui soutiennent la réalité ;
je comprenais ces ondes éthérées. J’ai cette certitude d’avoir su…

Et je ne sais plus !

J’entends maintenant des sons étranges et nouveaux.
Ils sont sans rythme, sans clarté. Je ne les comprends pas.

Mais je suis serein. Je comprendrai. Je suis fait pour ça.

*

J’oublie encore…

Je savais la forme de l’Univers, je m’en amusais encore il y a peu.
Aujourd’hui, je n’en vois plus la fin.
Je la devine, je la crois encore, mais je ne la sens plus.

Je suis à l’étroit, désormais.

C’est nouveau.

Ça m’inquiète.

*

J’oublie toujours, de plus en plus.

Je suis sûr que j’ai oublié même que je savais certaines choses. Mais lesquelles ?

La lumière. Je connaissais les couleurs,
du blanc absolu qui n’a existé qu’au tout début de la réalité,
jusqu’au plus sombre des trous noir qu’on croit en être la fin.

Maintenant, je flotte dans une ombre médiocre, et les couleurs s’enfuient de ma mémoire. Il faudra que je les retrouve.

Plus tard.

Mais le pourrai-je ?

*

J’ai maintenant perdu tout contact avec la Création.

Autrefois – mais quand était-ce – je connaissais l’entité qui se trouve derrière tout cela.
Je suis sûr que je l’ai connue. Mais plus maintenant.

Que me reste-t-il ?

Rien ne se passe.

*

Au secours !

La réalité ne veut plus de moi !

Je le sens bien : elle me presse, m’écrase, me chasse.
Si je quitte ma place, où irai-je ? Qu’y a-t-il en dehors ?
Mais je n’ai pas le choix. Je lutte, mais je perdrai.
Voilà au moins quelque chose que je sais encore :

je vais perdre ce combat.

*

La réalité a gagné.

Je suis Ailleurs. Le poids de je ne sais quelle force m’écrase.
Je sens un contact, doux et chaud.
Ça ne vaut pas la caresse de l’Univers, je le sais.
Mais rien ne vaudra ce que j’ai connu.

Alors je vais prendre ce qui m’est donné.

Plus tard, je lui donnerai un nom.

Et après, j’apprendrai à parler.

FIN

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